Mensonge

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Bouleversant. S'il fallait choisir un mot pour qualifier notre rencontre, ce serait celui-ci.

Le sud est devenu nord, le ciel, terre, le jour, nuit. Tout, tout à coup, fut bouleversé.

Je traversais les jours, l'esprit comateux. On me disait distant. Je n'étais simplement plus présent. Les rires de mes amis ne m'embarquaient plus. Le regard d'une épouse folle d'amour ne me touchait plus. Mon esprit grillagé semblait être devenu imprenable. Par chance, parfois, je parvenais à faire semblant et à mettre sur le compte du stress quotidien ce qui avait l'air de changements d'humeur mais qui n'était finalement que l'expression de ce que j'étais devenu. Un être perdu, triste, furieux de se découvrir si tard. Au même titre que les chimistes peuvent, par précipité, dévoiler la véritable nature de ce que l'on croyait n'être jusqu'alors que de l'eau, ta présence m'a précipité dans ma propre réalité. Mon contexte n'était que mensonge. Mensonge enveloppant amis, épouse, enfants. Déchirer ce voile masquant ma vérité aurait conduit à déchirer le cœur de mes êtres chers. De quel droit ? Impossible. Inconcevable.

A quelques jours de ce qui va être ma fin, il m'était impossible de ne pas exprimer clairement ce sentiment d'amour qui m'a rendu malheureux tant d'années. Je ne veux pas partir dans le silence. Au moment où tu liras ces quelques lignes, tu sauras. Ce que tu as fini par cesser d'espérer n'était en fait qu'une vérité étouffée. Je me suis consumé d'amour pour toi de très nombreuses années. Combien ? 25 ans ? 30 ? Chaque jour tu m'as accompagné. Chaque jour, chaque soir, je te saluais en t'embrassant. Je t'ai fait l'amour un nombre incalculable de fois. Un nombre incalculable de fois, j'ai jouis en pleurant. Je t'ai aimé. Ça me soulage de savoir que tu vas enfin le savoir. Ton espoir était loin d'être vainc. Ton vœux a été exhaussé en quelques secondes, certainement avant même qu'il ne te vienne à l'esprit. C'est dans la douleur que j'ai décidé de faire taire cet amour. Je t'aime.